MATÉRIAUX POUR LE LEXIQUE PHÉNICIEN -I
1992, Studi Epigrafici e Linguistici sul Vicino Oriente antico
Abstract
Xella 1. MDD. Un nom de métier à Carthage. Parmi les termes qui désignent des noms de métier ou de fonction, par ailleurs nombreux dans le corpus phénico-punique 1 , on doit inclure le terme mdd, attesté dans une inscription punique de Carthage (PI. I) 2. Il s'agit d'une simple dédicace à Tinnit pn b (l et à Baal Hammon exécutée par une femme dont le nom était mtnb'l. Cette dernière, comme c'est l'habitude, ne manque pas de mentionner son père et son grandpère tout en ajoutant à la fin de cette courte généalogie, immédiatement après le dernier nom de personne, le terme en question avec l'article (' = h): ... mtnb (I/ bt hmlk bn/hmlkt } mdd. À propos du sens du terme mdd, une évaluation comparative au sein du domaine sémitique ne laisse aucun doute sur la signification générale de la racine correspondante *mdd, qui signifie presque universellement «mesurer» 3. En punique, donc, le terme mdd, un part. act. qal, doit également signifier quelque chose comme «mesureur» 4 ou, si l'on veut, «géomètre» et appartenir probablement aux noms de métier liés à la sphère de la construction 5. Dans notre cas, même si l'on n'est pas en mesure de préciser exactement de quel type d'activité il s'agissait, on possède pourtant une preuve précieuse et rare du fait que la déduction étymologique est tout à fait fondée. Sur la stèle qui porte la dédicace en question, on voit en effet en haut une main bénissant, tandis qu'en bas, sous le texte, figure à droite le signe dit de Tinnit et à gauche une règle 6 .
References (40)
- -* W. Kornfeld, Neues uber die phônikischen und aramaischen Graffili in den Tcmpeln von Abydos : Anzcigcr der phil.-hisl. Klassc der Ôstcrrcichischcn Akademie der Wisscnschaften, 115 Jahrg. 1978, So. 11, p. 193-204.
- ESEIII.p. 113(Taf. XI, 60).
- W. Kornfeld, op. cit., p. 200 et pi. 12.
- " W. Kornfeld se limite toutefois à citer PTU, 173, resté sur les positions de UT. En réalité, le terme pqrcsi attesté en ugaritique dans KTU 4.147:2 (ici semble un NP), 4.224:7 et 4.286:6, où en effet il pourrait désigner une fonction. La situation est de toute façon moins claire que ce que pense Kornfeld.
- ' IK Cl A:7; B:l 1 (cf. en part. p. 112). La racine *n'r est en outre attestée dans le substantif mn'r «jeunesse», pi. avec suffixe de Ille p. m.s. (?) dans l'inscription de Kilamuwa (ΚΑΙ 37 A 12: Imn'ry). n'r'Smn.ci. F. Vattioni, I sigilli fenici : AION.41 (1981), p. 191 n°91 (avec bibliographie).
- " L'inscription de Salaminc de Chypre publiée par N. Avigad (Appcndix IV, p. 277, dans V. Karagcorghis, Excavations in the Necropolis of Salamis III. Salamis, vol. V, Nicosie 1973, n" 116 et pi. 167), est à lire comme un nom de personne, comme cela est soutenu à juste titre par plusieurs auteurs (cf. entre autres M. Sznycer, Salaminc de Chypre et les Phéniciens: AA.VV., Salaminc de Chypre. Histoire et archéologie, Paris 1980, p. 128-29;
- M.G. Amadasi Guzzo, Note epigrafiche: VO, 2 [1979], p. 1-3), tandis que G. Garbini, Un'iscrizionc funcraria fenicia da Salamina di Cipro : OA, 20 (1981), p. 119-23, en donnant de ce texte une lecture tout à fait différente, prétend y reconnaître la mention du dieu Yam dans un contexte funéraire.
- J.Mac Donald, The Status and Rôle of ί/ieNa'ar in Israélite Society: JNES, 35 (1976), p. 147-70;
- B. Cutler-J. Mac Donald, Identification ofthe Na<ar in the Ugaritic Texts: UF, 8 (1976), p. 27-35;
- N. Avigad, New Light on the Na'ar Scals : Magnalia Dei. Essays G.E. Wright, 1976, p. 294-300;
- J. Mac Donald, The Unique Ugaritic Tcxt UT 113 and the Question ofGuilds": UF, 9 (1977), p. 13-30 (military guilds); Id., The Unique Personnel Tcxt KTU4.102: UF, 10 (1978), p. 161-73 (classe spéciale de personnes, pas simplement des serviteurs).
- ' Avec cette nuance le terme semble avoir pénétré en égyptien: cf. W. Helck, op. cit., p. 563, n 5 136 (n-'-ru-na, «Elitctmppc»).
- d'un personnage qui se déclare marin 52 et il n'est pas du tout rare que d'autres Phéniciens de passage rappellent leur métier: mfpp 53 , kps 54 , ml$ 55 , tmr 56 et, peut- être, aussi S hpn 51 et mSpn 5 *.
- GLGL. Le tourneur/porteur de statue? Le terme glgl est documenté deux fois en phénico-punique apparemment comme apposition de noms de personne. Une inscription peinte en noir sur un vase en terre mis au jour à Sousse, dans la nécropole de Mahdia 59 , porte comme texte: ndb> bdmlqrt bn ( nn glgl °M... l'btlS... qr..... Une autre inscription d'El-Hofra, à Constantine, dont le contexte est par contre tout à fait clair, nous informe que l'auteur de la dédicace était un glgl mais, en plus, l'on ajoute qu'il était bglgl hmS, c'est-à-dire «le glgl de la statue» 60 . Si en effet la signification du seconde terme, mS, ne fait aucune difficulté, la détermination exacte du sens de glgl s'avère bien plus difficile, faute d'autres indices qui ne soient purement étymologiques. La racine de base a en général le sens de «rouler», «tourner» et aussi d'«être rond» 61 , mais quelle peut bien être la signification du substantif correspondant ? À propos de l'inscription de Sousse, le RES, étant donné la valeur sémantique de la racine, a pensé que le mot pourrait désigner le vase fait au tour de potier (en effet, notre terme pourrait bien être ici l'objet du verbe ndb').
- A. Berthier et R. Charlier, de leur côté, selon un raisonnement en partie analogue, ont songé à un artisan qui travaille au tour pour fabriquer des statuettes et des figurines 62 . Il est aussi à remarquer que le DISO aussi distingue entre le glgl de Sousse, pour lequel on propose hypothétiquement «roue», et le glgl d'El-Hofra, à propos duquel on se limite à noter qu'il pourrait s'agir d'un titre de fonction 63 . 52 ΚΑΙ 49:2.
- 53 ΚΑΙ 49:7.
- 54 ΚΑΙ 49:16. 55 ΚΑΙ 49:17.
- 56 ΚΑΙ 49:27.
- 57 ΚΑΙ 49:19.
- 58 ΚΑΙ 49:26.
- '" RÉS 907: l'inscription «... fait le tour du vase au niveau du bas de l'anse qui la sépare en deux parties» (p. 256).
- A. Berihicr-R. Charlier, Le sanctuaire punique d'El-Hofra à Constantine, Paris 1955, n 5 48, 2: 'S ndr hglgl hmS. À remarquer la double présence de l'article.
- DRS II, s.v. g/g/,p. 118.
- A. Berthier-R. Charlier, op. cit., p. 45 (p. 46: «tourneur de vases»).
- DISO, ss.vv. glgl I et II, p. 50, suivi par Fuentes, op. cit., p. 97 (pour «roue» dans RÉS 907, voir jadis Harris, op. cit., s.v., p. 94: «wheel» [?]); quant à Tomback, op. cit., s.v., p. 65, qui ne semble connaître que la mention d'El-Hofra, il traduit «wrapper (of ?) vowed». connues jusqu'à présent qui se base sur la date des trouvailles 70 . L'Auteur n'a pas inséré dans cette série l'inscription ICO Sard. 21, perdue avant que son texte ait été connu, ainsi que d'autres documents mineurs comme «alcuni bolli d'anfora (...), i segni (forse aramaici) graffiti su un piatto greco e l'enigmatica iscrizione dipinta su un vaso délia Collezione Pesce» 71 . Après une évaluation générale de la typologie des inscriptions phéniciennes de Tharros, G. Garbini étudie enfin en particulier trois documents 72 , pour lesquels il avance de nouvelles propositions interprétatives. Puisque l'intention de l'Auteur est d'offrir «una aggiornata messa a punto délia situazione, anche in vista di ritrovamenti futuri ...» 73 , il ne semble pas inutile de proposer ici quelques remarques afin de compléter les données fournies par G. Garbini. Tout d'abord, à la bibliographie citée par l'Auteur, il faut ajouter pour être complet l'article de M.G. Amadasi Guzzo 74 , qui porte le même titre que le livre publiée en 1990 par le même Auteur 75 . L'inscription classée par G. Garbini Tharros 1 (= ICO Sard. 5) est rangée par l'Auteur dans la catégorie «funéraire». En effet le support, une hémisphère en pierre dolomitique, a été trouvé (avec d'autres objets) dans une tombe, mais l'épigraphe devrait plutôt être considérée comme un texte d'appartenance: msk lmgn bn hnb'I, c'est-à-dire, «pierre à aiguiser (?) 76 appartenant à NP fils de NP». L'inscription classée par G. Garbini Tharros 4 (= ICO Sard. 8), était ainsi décrite par M.G. Amadasi Guzzo: «Tre lettere incise sotto la base di un amuleto in pasta biancastra con la rappresentazione di due figurette unité nel dorso» 77 . Or, comme l'a remarqué G. Garbini lui-même, l'objet en question vient d'être publié dans le Catalogue du matériel de Tharros du British Muséum 78 . Il s'agit d'une amulette en stéatite du type deity on the crocodiles, «a poorly made figure with the god (une version de Ptah-Patèque) on the front and back and the stylised figures of two /υ G. Garbini, Tharros-XVII. Iscrizioni fenicie a Tharros : RSF, 19 (1991 ), p. 223-31.
- *• Il s'agit des inscriptions n e 18, 19 et 25 selon la numérotation employée par G. Garbini, qui correspondent respectivement à ML. Uberti: RSF, 6 (1978), p. 73-75 et à ead., ibid., p. 75-76; en ce qui concerne la dernière inscription, elle reçoit le n° 3 à la fin de l'étude: il s'agit en réalité d'un nouveau texte, identifié par l'Auteur sur un des deux blocs de pierre situés à droite du «tempietto K». 73 G. Garbini: RSF, 19 (1991), p. 223.
- M.G. Amadasi Guzzo, Iscrizioni fenicie e puniche in Italia : Bollettino d'Aile, 39-40 (1986), p. 103-18(surTharros,cf.p. 106 et notes 56-62, p. 115).
- •> M.G. Amadasi Guzzo, Iscrizioni fenicie e puniche in Italia, Roma 1990 (= Ministero per i Béni Culturali e Ambientali -Comitato Nazionale per gli studi e le ricerche sulla civiltà fenicia e punica, Itinerari -VI).
- ° Signification incertaine mais probable, cf. ICO, p. 89. Quoi qu'il en soit, l'objet semble avoir été la propriété du défunt, déposé à côté de lui dans la tombe.
- ICO, p. 90.
- ^ R.D. Barnett-C. Mendleson (éds.), Tharros. A Catalogue ofMaterial in the British Muséum from Phoenician and Other Tombs at Tharros, Sardinia, London 1987 (et non pas 1988!), fig. n e 25.10/31, p. 42,110,167 (cf. aussi pi. 66 o).
- P. Xella goddesses on the sides» 79 . Quant à la datation, imprécisée pour G. Garbini, elle peut être proposée sur la base d'une comparaison avec un autre texte d'origine égyptienne. En effet, un yod et un lamed pareils à ceux de notre inscription ont été récemment identifiés sur une Schreiberpalette provenant d'Egypte, actuellement conservée au Musée de l'Université de Wiirzburg, publiée par W. Rôllig et K.-Th. Zauzich 80 , qui datent l'inscription (à divers égards encore énigmatique) du Ville siècle av. J.C. L'inscription classée par G. Garbini Tharros 5 (= ICO Sard. 10) et incisée sur un scarabée est, selon l'Auteur, aujourd'hui perdue. En réalité, l'amulette en question se trouve au Musée de Cagliari (Inv. n e 9450, Collection Spano): elle a été republiée par M.L. Uberti 81 et est aussi mentionnée par F. Vattioni dans son recueil des sceaux phéniciens 82 . L'inscription classée par G. Garbini Tharros 8 (= ICO Sard. 14) ne correspond pas à CIS I 185, mais à CIS I 155. En ce qui concerne l'inscription classée Tharros 13 par G. Garbini (= ICO Sard.
- ajouter à la bibliographie E. Lipinski, Carthaginois en Sardaigne à l'époque de la première Guerre Punique, dans H. Devijver-E. Lipinski (éds), Studia Phoenicia X. Punie Wars, Leuven 1989, pp. 67-73 (même avec quelques reserves pour l'interprétation proposée). Il faut enfin encore ajouter au corpus épigraphique de Tharros les inscriptions suivantes, qui ne sont pas inclues dans la liste rédigée par G. Garbini: 1) BM 133112 = 56-12-23, 319: Barnett-Mendleson, op. cit., pi. 18B, 131, n a 30/4, (IVe-IIIe siècles av. J.C, cf. p. 228-29), à lecture et interprétation difficiles 83 ;
- le sceau publié par G. Spano en 1863 et compris dans le recueil de F. Vattioni sous le n 9 13, à légende <bmlqr u ;
- le sceau publié par même G. Spano à la même date, qui figure dans le recueil de F. Vattioni sous le n-14, à légende bn b'idgn^. 79 /Wd,p. 167.
- K.-Th. Zauzich-W. Rollig, Einc àgyplischc Schrcibenialcttc inphonizischer Umgestaltung : OrNS, 59 (1990), p. 320-32.
- °' M.L. Uberti, Scarabco punico dcl Museo Archcologico Nazionalc di Cagliari, dans Atti dcl 1 Convcgno Ilaliano sut Vicino Oriente anlico, Roma 1978, p. 157-62.
- F. Vattioni: AION,41(1981),n'll.
- Pour d'autres lettres incisées sur des tessons, voir Barnett-Mendleson (éds), op. cit., p. 61.
- °4 G. Spano: Memoric dell'Accadcmia dellc Scienzc di Torino, Ser. II, t. XX, 1863, p. 100, tav. 2.E; voir aussi P. Schrôder, Die Phonizische Sprachc, Halle 1869, p. 274, n" 9, Taf. IV,4. ld., ibid., tav. 2.F; voir aussi P. Schrôder, op. cit., p. 274, n ç 10, Taf. IV.5.