Yannick Haenel, la littérature pour absolu
2020, Hermann
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Abstract
Quatrième de couverture : Yannick Haenel est une personnalité hors norme dans le paysage culturel. Son travail est une lutte pour faire une place à des valeurs souvent dénigrées : le besoin de sens, d’émerveillement, d’intériorité, de beauté, de désir ; il se démarque ainsi du pessimisme qui plombe un bon nombre d’œuvres contemporaines. Il offre un exemple de réflexion constructive sur le rôle éthique et politique nécessaire de la littérature et de l’art face aux pages douloureuses qu’écrivent l'Histoire et l’actualité. Il fait entendre une voix qui, malgré le malheur, relance le droit à la vie avec gravité autant qu’avec humour. Son but : engager vers un « retour des temps désirables ». À aucun moment il n’est question de nier la noirceur, mais de perpétuellement évoluer parmi les avalanches. Yannick Haenel ne cesse ainsi de proclamer et de vivre la littérature comme un facteur d’énergie et une joie imprenable.
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Revue Critique De Fixxion Francaise Contemporaine, 2013
Alexandre Gefen et Émilie Brière rencontrent YANNICK HAENEL Émilie Brière §1 Je vais commencer en vous posant une question peut-être un peu naïve : j'ai eu l'impression en préparant l'entretien que Jan Karski est en quelque sorte un hapax dans votre oeuvre, qu'il a une place à part, à la fois dans les moyens de narration que vous employez et dans le rapport à la parole que vous décrivez. En écrivant Jan Karski, avez-vous ressenti qu'il s'agissait d'une autre démarche d'écriture que celle que vous avez mise en oeuvre dans vos romans antérieurs et dans vos textes subséquents ? Yannick Haenel C'est vrai, l'écriture de Jan Karski a été comme une interruption d'un certain débordement d'écriture dont Cercle était l'un des moments. Il fallait que je me rende disponible à ce personnage en coupant mes moyens, c'est-à-dire en inventant une forme d'écriture sobre, une écriture où je serais présent le moins possible, où-en un sens-, je ferais le moins de phrases possible, afin d'essayer de cerner cette chaise vide qui est là au début du livre et que l'on voit dans l'entretien avec Claude Lanzmann, à cet instant où Karski s'absente. Ce qui m'intéressait, c'était de savoir si quelqu'un peut habiter cette place vide, c'est-àdire se mettre non pas à la place de Jan Karski, mais à la place de ce vide. À un moment, il quitte son fauteuil, et c'est comme si c'était ce fauteuil qui continuait à nous parler. Je me disais : il faut trouver les phrases pour dire cette place vide. Et pour que ce soit vraiment Jan Karski qui parle, pour que je puisse me permettre d'écrire son nom, son vrai nom, sur la couverture-puisqu'il y a deux noms, en fait (le sien et le mien)-, il fallait que je cesse d'écrire comme j'écrivais avant. C'est la première fois que je tente de trouver un dispositif d'écriture. J'ai arrêté le flux qui était le mien, qui me semblait comme une allure naturelle. Cercle faisait deux mille pages (j'ai coupé énormément pour la publication), et j'ai continué à écrire comme cela après, ce qui était problématique pour moi, parce que ça ne s'arrêtait plus, il y avait un côté kerouaquien, si je puis dire. Tout était susceptible d'entrer dans le torrent. Jan Karski m'a obligé à trouver une forme pour oser parler de quelqu'un qui n'était pas moi, et qui n'était même pas une projection de moi-même. Alexandre Gefen §2 Justement, vous traitez des politiques de la littérature. Le thème est un peu le même, quand même. Est-ce le thème d'un silence qu'il faudrait combler ? Pourquoi s'emparer de cette place-là ? Et qu'est-ce qu'on fait à cette place-là ? Est-ce qu'il s'agit de dire le scandale, de dire le néant que ce scandale signifie, ou est-ce qu'il s'agit de le compenser, de le réparer ? Y. H. : L'idée de réparation était très présente. L'idée juive du tikkoun. Racheter une âme : idée catholique, mais juive aussi. Au départ, il s'agissait moins d'un
French Forum, 2021
Yannick Haenel est un écrivain français cinéphile qui intègre ainsi de nombreuses références à des films dans ses textes. Le cinéma est un art important pour l’auteur de Cercle (2007) qui, au même titre que la peinture ou la musique, imprègne de manière non négligeable ses écrits où il est appréhendé comme un réservoir de puissantes expériences sensibles et réflexives. Cette dynamique est tout particulièrement à l’œuvre dans Tiens ferme ta couronne (2017), dont une des trois parties est précisément intitulée « Des films » et où la figure du cinéaste américain Michael Cimino, frère de cœur et d’esprit du personnage principal aussi narrateur, se révèle prépondérante. C’est en effet ce roman qui célèbre le plus intensément les noces entre le cinéma et la littérature, pour reprendre une formule employée par l’auteur lorsqu’il s’est vu remettre le prix Médicis pour ce livre. On s’arrête dès lors, dans le cadre de cet article, sur ce texte spécifique afin de voir quel imaginaire filmique il déploie et fait vibrer, comment littérature et cinéma s’y entrelacent, en activant notamment la tension visible-invisible depuis laquelle s’opère une singulière traversée de l’écran.
2012
French contemporary novels continue to be haunted by the memory of the Second World War, Nazism, Collaboration and the Holocaust. But what kind of memory is transmitted? Focusing on three recent novels Jonathan Littell´s Les Bienveillantes (2006), Yannick Haenel´s Jan Karski (2008) en HHhH by Laurent Binet (2011) I suggest that the end of the war does not entail the end of the war of memories. Littell and Haenel both recur to a formal device giving the narrative voice to a fictional or historical witness which allows him to express a view on the Second World War that does not correspond to a traditional black-and-white perception, without downplaying however the criminality of Nazi politics. Laurent Binet, on the contrary, favors a metanarrative approach of the novel, questioning its claim to historical truthfulness, in order to express his nostalgia of an epic conception of history.
Rite et création, 2020
Chapitre de l'ouvrage collectif 'Rite et création', coordonné par Myriam Watthee-Delmotte.
Carnets
Revue électronique d'études françaises de l'APEF Deuxième série-23 | 2022 (In) actualité de l 'ironie dans la prose d 'expression française (2010-2020)
Revue Tête-à-tête, 2017
Plusieurs éléments de l’œuvre de Yannick Haenel, écrivain français né en 1967, font directement écho à la question du « disparaître » : ses narrateurs sont des déserteurs qui ne cessent de se dérober ; la notion d’identité y est saisie comme un mirage aliénant dont il convient de se détacher ; la question de la liberté y est primordiale ; le vide, le calme et la solitude constituent des motifs récurrents et décisifs de ses textes ; ses livres mettent en place une poétique de l’errance ; la perspective d’une autre dimension d’existence y est avancée, voire valorisée ; etc. Questionner Yannick Haenel sur la volonté de disparaître – sur l’actualité d’un tel geste –, qui caractérise à la fois la dynamique interne de ses récits et sa posture d’écrivain, vise à cerner de plus près l’enjeu créatif de cette problématique.
TTR, 14:2, 2001
Labarthe et Jean-Luc Nancy désignent le projet romantique comme un « absolu littéraire » (1978), j'aimerais qualifier, à mon tour, celui d'Antoine Berman d'« absolu critique ». L'idéal de l'absolu prend toute son actualité dès qu'il est associé à l'écriture d'Antoine Berman. Chez Berman la pensée est ambitieuse; elle se donne sans réserve. Berman se retrouvait non seulement dans la passion que les Romantiques vouaient à la littérature, mais dans leur respect pour la critique. Il voulait donner à l'activité critique l'importance la plus grande, la vocation la plus sérieuse, celle « d'écrire sur d'autres oeuvres, avec passion et rigueur », suivant en cela les traces de Walter Benjamin, Maurice Blanchot, Roland Barthes et Jorge Luis Borges (Berman, 1995, p. 13). La tâche principale de Berman aura été de rendre à la traduction toute la dignité et la profondeur de la critique littéraire. and intellectual engagement.
Essais. Revue interdisciplinaire d’Humanités, 2020
À travers une lecture du roman 'Je cherche l’Italie' (2015) de Yannick Haenel est soulignée la manière toute singulière suivant laquelle la littérature (le poétique) permet d’étendre la compréhension que l’on se fait habituellement du politique, la plupart du temps réduit à une lutte pour la conquête d’un pouvoir de l’État ou dans l’État, à l’organisation des pouvoirs ou à un art/exercice de gouverner. Il s’agit ainsi de mettre en lumière la façon dont l’écrivain français, par son récit, fait de l’amour, qui a été peu à peu relégué au cercle intime, le cœur d’une possible reconfiguration du politique au sein de la société occidentale contemporaine en crise(s) et comment Haenel établit l’amour en tant que principe politique solide et déterminant pouvant venir revitaliser voire restructurer anarchiquement le vivre ensemble. L'article peut être consulté en ligne, voir : https://journals.openedition.org/essais/1191 //PLAN : > Renverser l’insoutenable, acter la rupture > Repenser l’articulation solitude-communauté > Le baiser comme geste fondateur > Puissance anarchique de l’amour > Où s’entremêlent le poétique et le sacré
Mémoires du livre/Studies in Book Culture, 2016
[Article disponible en ligne à l'adresse suivante : http://www.erudit.org/revue/memoires/2016/v8/n1/1038033ar.html] Que se passe-t-il lorsque la « littérature sauvage » trouve des passeurs dans le champ institué? Tel est le cas des graffitis dans l’oeuvre de Yannick Haenel, au sein de laquelle des phrases rapportées occupent toujours un rôle central, constituant la force motrice de l’écriture. Plusieurs de ses romans (Cercle, Les renards pâles, Je cherche l’Italie) intègrent à leurs intrigues des tags qui proviennent des murs des villes que parcourent les narrateurs haeneliens. Les Renards pâles, publié en 2013, exploite tout particulièrement ce processus. Les différents graffitis retranscrits et insérés dans la textualité du roman, loin de perdre leur statut « sauvage » en rentrant dans le rang de la forme livresque institutionnalisée, viennent, en tant que « phrases-talismans » investies d’une puissance sacrée, nourrir et renforcer l’aspect « vif » de l’écriture de l’écrivain français. Cette pratique scripturale singulière se voit également insuffler une portée politique – elle permet de rejouer deux notions déterminantes du politique : l’identité et la communauté –, mais surtout révolutionnaire et anarchique, en ouvrant à une autre voie, celle du symbolique. // PLAN : Un réseau de phrases – élan vital, force sacrée ; Portée politique – « de l’autre côté » ; Retour de l’origine – le symbolique, le poétique.
仏文研究, 2009
Je proteste de nouveau que je ne prétends pas peindre les choses en elles-mêmes, mais seulement leur effet sur moi. » Stendhal, Vie de Henry Brulard. Comme le drame, le roman est une fiction et demande au lecteur un pacte clair: qu'il sache qu'il s'agit d'une oeuvre artistique. Celle-ci ne saurait pas être réelle comme un événement ou une action dans la vie normale, néanmoins elle peut produire des émotions presque aussi fortes que si elle l'était. En parlant du théâtre dans Racine et Shakespeare, Stendhal raconte l'anecdote de ce spectateur qui, assistant à une représentation d'Othello, se précipite sur la scène avec son épée pour défendre Desdémone. Le but de ce petit récit est double, car il exprime la naïveté d'une identification simple avec l'art mais aussi le rapport étroit entre l'art et la vie à travers le jeu de la fiction. La bonne littérature, le bon théâtre permettent de connaître mieux la vie, ou, en d'autres termes, l'art n'imite pas la vie, mais montre le possible dans la vie, même par le truchement des inventions romanesques qui puisent dans les machineries théâtrales -telle l'échelle que, dans Le Rouge et le Noir, Julien place contre la fenêtre de Mathilde pour monter dans sa chambre. La valeur philosophique de la connaissance de la vie est affirmée très tôt par Stendhal" dès l'époque où il s'essayait au drame, quand il écrivait à sa soeur Pauline en lui conseillant des lectures et en lui suggérant ce qui pouvait l'aider dans la recherche du bonheur. Il lui semble essentiel de connaître les passions humaines. La littérature constitue une des grandes voies d'accès à ce type de savoir, avec les bons ouvrages de philosophie, l'étude des autres et de soi-même. Les livres essentiels se réduisent à peu d'auteurs, les meilleu~s, selon Stendhal, étant Hobbes et Hume, Shakespeare, Cervantès, Molière et Corneille. Pauline doit observer les gens dans les salons, analyser tous les jours ce, qu'elle a ressenti, et interroger ses amies sur leurs sentiments. Stendhal remarque que, même si les moeurs changent selon les lieux et les époques, ils influent sur les passions qui, elles, sont plus ou moins les mêmes depuis que les êtres humains existent; il pousse sa soeur à esquisser des taxinomies, en classifiant les affects en passions, états de passions et moyens de passions :

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