Pour une histoire-mondes (Merkur, n° 799, 12.2015, VF)
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Related papers
2009
Le developpement de la « nouvelle astronomie » ou « nouvelle philosophie » des la fin du XVI e siecle en Europe provoque un essor formidable de la litterature du voyage cosmique des les annees 1630, notamment en Angleterre ou l'opposition theologique ne se manifeste pas aussi violemment que sur le continent. La litterature du voyage cosmique n'a certes pas attendu le XVII e siecle pour faire son apparition. Il suffit de se tourner vers l'Antiquite et de lire, par exemple, L'Histoire vraie de Lucien de Samosate, 2 le Somnium Scipionis de Ciceron ou encore le De Facie in orbe lunare de Plutarque, pour se convaincre que l'idee de voyager dans l'espace fascinait deja l'humanite. L'apport du XVII e siecle ne concerne donc pas tant la thematique que le mode narratif du recit de voyage cosmique. Jusque-la le voyage dans l'espace relevait entierement du mode merveilleux. 3 Or l'invention du telescope permet de verifier visuellement un certain nombre d...
Lampadaire, 2024
Mot-clés : érudite L'année 2024 marquera le centenaire des observations de l'astronome Edwin Hubble confirmant l'existence de galaxies à l'extérieur de la Voie lactée. Alors que la position dominante considérait notre galaxie comme constituant l'entièreté de l'univers, les découvertes du chercheur américain poussent la communauté scientifique à sonder le cosmos au-delà des limites qu'ils tenaient auparavant pour fixes. Il va sans dire que, si importantes soient-elles, ces observations sont loin d'être le premier exemple d'une réflexion à propos de la finitude du monde. De telles questions trouvent encore une place dans les discussions scientifiques récentes, mais sont aussi de plus en plus récupérées dans les médias de divertissement et dans la culture populaire. 1. Le texte est édité et traduit en anglais par Claudia . Ci-après abrégé De Celo. 2. Si l'historiographie concernant Oresme est toujours florissante aujourd'hui, il faut à tout le moins souligner l'apport pionnier de Pierre Duhem, sur lequel Edward Grant a considérable bâti par la suite. Notons entre autres
Revue internationale d'éducation de Sèvres, 2009
Essais, 2018
« Si un lion pouvait parler, nous ne pourrions pas le comprendre 1. » Les études de l'homme et de la nature n'ont eu de cesse de se séparer alors que les savoirs se transformaient en disciplines de plus en plus spécialisées mais lointaines les unes des autres. Née dans le contexte positiviste au sein de ces sciences qui, devenant modernes, s'étaient coupées des classiques humanités, l'écologie fut longtemps délaissée par ces dernières jusqu'à un passé récent. Elle procède de la nécessité d'étudier, à nouveau, homme et nature ensemble. En oeuvrant à concilier le souci descriptif de la nature, celui, prescriptif, des façons de vivre en bonne intelligence avec elle, ainsi que celui, esthétique, d'une forme d'écriture lisible par tous, des scientifiques comme Aldo Leopold (Almanach d'un comté des sables, 1949) et Rachel Carson (Printemps silencieux, 1962) ont pleinement participé par leurs écrits, à construire une passerelle unissant la connaissance scientifique de la nature et la pratique, linguistique et éthique, des humanités. Emprunter cette passerelle suppose de sortir de l'enfermement disciplinaire et de se saisir de l'écologie comme d'un objet d'étude, à la manière dont s'y est pris Arne Naess, l'un des premiers à avoir formulé les principes d'une philosophie de l'écologie au début des années 1970. Cette date marque d'ailleurs un tournant épistémologique qui a vu un nombre croissant de sciences humaines et sociales emprunter cette passerelle en prenant l'écologie ou l'environnement pour objet 2 .
Dans le Zeit du 05 mars 2009, l'écrivaine Kathrin Röggla constate que nous n'avons pas encore trouvé de forme narrative pour expliquer la crise financière mondiale. Une nouvelle dramaturgie politique a eu beau se développer autour de la mondialisation sur le modèle du film-catastrophe, personne aujourd'hui n'est capable de donner le dénouement de cette crise. Il faudrait donc en inventer un. Dans un hors-série de la revue Sciences humaines de mars-avril-mai 2009 intitulé Idéologies, le retour de flamme, Jean-François Dortier fait le constat d'un retour des « grands récits » qui accompagne le retour des idéologies. En littérature, depuis le début des années 1990, on assiste, en Allemagne, avec des théoriciens comme Vera et Ansgar Nünning, à une émergence de la narration « post classique » (Nünning, 2002). Le concept de fiction, en littérature et au-delà, a un succès croissant. Depuis le narrativist turn des années 1980, nous serions entrés dans un nouvel « âge narratif », voire même dans l'âge de l'« impérialisme narratif » (Phelan, 2005). Avec le storytelling (Christian Salmon), tout serait devenu narratif : le management, la politique, le journalisme, les thérapies, mais aussi l'économie (Deirdre Nansen McCloskey, 1998), la science politique et, in fine, toutes les sciences humaines et sociales. À l'ancien « Ce n'est qu'une histoire, donne-moi des faits » de la pensée logique se serait substitué un « Ce ne sont que des faits, donne-moi des histoires ».
Presses Universitaires de France eBooks, 2021
Des mondes qui nous soutiennent Alors qu'il quitte Vienne à l'approche du second conflit mondial, le phénoménologue Alfred Schütz approfondit ses travaux sur les conditions de notre rapport au monde ordinaire. La crise de l'exil a cruellement aiguisé son regard de sociologue. Tandis qu'il rejoint les États-Unis, son univers familier sombre dans un terrible cauchemar, révélant l'étendue de sa fragilité. Il débarque dans ce nouveau monde qui le révèle dépourvu de toute aisance. Poursuivre sa vie sur fond de tragédie, tenter malgré tout de s'immerger dans ces façons inhabituelles de faire et de dire, de se lier à autrui, de manger, de se déplacer, d'habiter, de
Littératures classiques. Supplément, 2004
Machines volantes, machine du monde et machinations romanesques dans Les États et Empires de la Lune et du Soleil. Les romans de Cyrano prennent la forme de deux voyages imaginaires dans l'espace, mais aussi de deux voyages parodiques, philosophiques et oniriques dans les sciences du temps de Cyrano. L'histoire des lettres et des sciences les a ainsi souvent considérés comme deux formes de science-fictions très étonnantes au XVII e siècle. Mais le terme de « science-fiction » pose problème. En effet, on ne trouve pas de sciences fictives dans ces romans, juste certaines technologies imaginatives et encore, toutes fondées sur les réflexions de savants de l'époque, et souvent même de penseurs très antérieurs. L'usage du discours scientifique de Cyrano remonte aux origines antiques où science et philosophie ne formaient qu'un tout, où l'évolution de la science s'accompagnait de l'évolution des doctrines philosophiques qui leur sont attachées. L'univers philosophique et scientifique de l'auteur a déjà été étudié depuis longtemps par Madeleine Alcover dans sa thèse incontournable sur « la pensée » de Cyrano 1. On ne peut que référer à un tel travail d'érudition, base de départ de toute réflexion sur les « systèmes » explorés par Cyrano, même si le titre renvoyant à une pensée unique et globalisante peut poser problème dans la mesure où Cyrano combat l'idée même de pensée univoque. C'est donc à partir de l'étude par Madeleine Alcover de certains procédés d'ascension du narrateur, que je tenterais d'analyser l'usage des machines au service d'un monde conçu comme machine et machination. Je partirai ainsi de l'étude mécanique et technique des moyens permettant les voyages dans les romans et suscitant une réflexion sur la vaste Machine du Monde, pour proposer une nouvelle approche de ces textes qui peuvent se lire comme des « romans machines ». Il s'agira ainsi de voir comment Cyrano joue avec les trois sens du terme. En effet, la « machine » renvoie au XVII e siècle à une triple signification : 1) une invention ingénieuse, un engin ; 2) une machinerie, combinaison complexe d'engins ; 3) une machination, une ruse 2. En représentant des engins volants, Cyrano ouvre une interrogation plus vaste sur la complexité de l'idée de monde 3 , dans une stratégie libertine rusée pour remettre en question les théories du monde en vigueur de son temps. Les engins volants représentés par Cyrano dans ses romans relèvent de la mécanique, « science qui considère les forces mouvantes et la durée du temps du
Demain l'écologie ! Utopies et anticipations environnementales, ArchéoSF, 2020
Au XIXe siècle, la Révolution industrielle a profondément modifié le rapport de l’être humain à la nature. Dès cette époque, l’imaginaire littéraire s’est penché sur la question écologique et les textes d’anticipation réunis dans cette anthologie (datant de 1810 à 1920 et pour la plupart réédités pour la première fois) envisagent les atteintes à la nature, la destruction de l’environnement, voire la fin du monde. Devant les développements de la science et de l’emprise de l’humanité sur la Terre, certains imaginent une planète où la nature a disparu, où l’eau de source est une denrée plus rare qu’un vin millésimé, où les derniers oiseaux se trouvent en haut d’un Himalaya pris d’assaut par les villes, où l’on vit dans les égouts parisiens, d’autres font part de leurs craintes face à l’épuisement des ressources naturelles, tous lancent des avertissements qu’il faudra bien se résoudre un jour à écouter. « Alors commencera la redoutable période où l’excès de la production amènera l’excès de la consommation, l’excès de la chaleur, et la combustion spontanée de la Terre et de tous ses habitants. Il n’est pas difficile de prévoir la série des phénomènes qui conduiront le globe, de degrés en degrés, à cette catastrophe finale. Quelque navrant que puisse être le tableau de ces phénomènes, je n’hésiterai pas à le tracer, parce que la prévision de ces faits, en éclairant les générations futures sur le danger des excès de la civilisation, leur servira peut-être à modérer l’abus de la vie et à reculer de quelques milliers d’années, ou tout au moins de quelques mois, la fatale échéance. Voici donc ce qui va se passer. » (1872)
Entretiens sur la pluralité des mondes, 2024
Dans sa préface aux ‘Entretiens sur la Pluralité des mondes’, Fontenelle déclare : « Je n’ai rien voulu imaginer sur les habitants des mondes qui fût entièrement impossible et chimérique. J’ai tâché de dire tout ce qu’on en pouvait penser raisonnablement, et les visions mêmes que j’ai ajoutées à cela ont quelque fondement réel. Le vrai et le faux sont mêlés ici ; mais ils y sont toujours aisés à distinguer.» Ce “divertissement”, certes, est aussi un témoignage du développement des sciences empiriques et mécaniques dans la France érudite de la fin du XVIIe siècle.

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References (3)
- 'européocentrisme 10 . D'une certaine manière, donc, toutes les opérations de comparaison et de traduction menées de front dans L'Histoire à parts égales visent à rendre plus sinueuse -et ce faisant, plus convaincante -une généalogie du monde moderne un peu trop hâtivement tracée au cordeau. Dans un magnifique texte, Roland Barthes rappelait que la puissance narrative de Michelet tenait, non pas à son pathos, assurément démodé, mais à sa capacité, en épiçant le récit canonique des grands événements d'une myriade de détails en apparence anodins, à « troubler la proportion des faits 11 », partant à briser les auras de majesté dont sont indûment parés certaines dates et certains personnages. Peut-être l'histoire-mondes que j'appelle de mes voeux consiste-t-elle, en accordant autant d'importance à un prince javanais qu'à un capitaine hollandais, et en conférant une même valeur documentaire à un texte malais qu'à un ouvrage européen, à troubler la trompeuse proportion des faits sur laquelle repose l'européocentrisme.
- John-Paul Ghobrial, « The Secret Life of Elias of Babylone and the Uses of Global Microhistory », Past and Present, 2014, 222 (1), pp. 51-93, et Francesca Trivellato, The Familiarity of Strangers. The Sephardic Diaspora, Livorno, and Cross-Cultural Trade in the Early Modern Period, New Haven, Yale University Press, 2009.
- Roland Barthes, « Aujourd'hui, Michelet », in Le bruissement de la langue. Essais critiques IV, Paris, Seuil, 1984 [1972], p. 243.