Au coeur des études mémorielles, la postmémoire conceptualisée par Marianne Hirsch se définit comme la relation qu'entretient la génération venant après celle des témoins avec le traumatisme culturel et collectif vécu par les générations...
moreAu coeur des études mémorielles, la postmémoire conceptualisée par Marianne Hirsch se définit comme la relation qu'entretient la génération venant après celle des témoins avec le traumatisme culturel et collectif vécu par les générations précédentes. Cette postgénération «se souvient» par conséquent d'évènements qu'elle n'a vécus qu'à travers les récits, images, et comportements de ceux auprès de qui elle a grandi (106). Il s'agit donc de se remémorer un évènement qui n'a été vécu que par ses parents, grands-parents ou ancêtres, mais qui a encore des conséquences sur les générations plus jeunes. Dans le roman de Modiano, le narrateur de Dora Bruder s'interroge sur ses propres liens familiaux avec le régime de Vichy, tout en enquêtant sur la fugue de Dora, une jeune fille juive, pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans La Seine était rouge de Leïla Sebbar, des adolescents se penchent sur la participation de leurs familles respectives à la manifestation pacifique d'Algériens à Paris en 1961 contre le couvre-feu qui leur est alors imposé, manifestation qui sera violemment réprimée par la police française. Dans Le village de l'Allemand ou le Journal des frères Schiller de Boualem Sansal, Malrich examine son histoire familiale, et découvre le passé nazi de son père Hans Schiller à travers le journal de son frère Rachel (surnom de Rachid-Helmut) suicidé, après la mort de leurs parents lors d'un attentat islamiste en Algérie. Alors que le concept de la postmémoire s'articule, selon Hirsch, à travers la transmission mémorielle dans le cadre familial, ces romans nous amènent à nous interroger sur ce qui se passe lorsque les mémoires familiales ne sont pas verbalisées au sein des familles. Afin d'examiner comment le silence s'impose et comment les mémoires peuvent être néanmoins récupérées, il convient de s'attarder sur les différents types de silence, avant de faire le point sur l'aliénation subie envers la langue, pour enfin proposer des moyens détournés pour récupérer la postmémoire, tout d'abord à travers des prothèses mémorielles, puis à travers