Dès les années 1920, et plus nettement encore au cours des décennies suivantes, le cinéma américa... more Dès les années 1920, et plus nettement encore au cours des décennies suivantes, le cinéma américain fut déclaré « classique » en dépit de son évidente modernité. Ses défenseurs affirmaient ainsi leur confiance dans un art populaire et neuf, que ses liens avec l’industrie avaient très tôt rendu suspect aux gardiens de la tradition. Cette première phase de légitimation passée, ce fut ailleurs qu’on chercha la qualité classique d’Hollywood : dans la conformité à des normes stylistiques et narratives, dans la structure économique des studios de l’âge d’or, dans leur puissance d’innovation esthétique et technologique. À se déplacer ainsi, de génération en génération, la notion de « classicisme hollywoodien » devenait source de malentendus. Ce cinéma, d’abord destiné à des millions de spectateurs avides de divertissement, avait-il vraiment été classique, au sens que l’histoire du goût donne à ce mot ? Des films soumis à de stricts impératifs économiques, moraux et idéologiques peuvent-ils...
Sirènes portuaires et pentes fatales. Quelques remarques sur San Francisco, ville sans loi du film noir
« San Francisco in Film Noir, or : Barbary Coast Revisited » San Francisco has been used as a set... more « San Francisco in Film Noir, or : Barbary Coast Revisited » San Francisco has been used as a setting in film noir more often than any other American city of comparable size. This apparent generic affinity is linked both to the city’s mythology and topography. On the one hand, the criminal plot often relies on the mythical lawlessness of “Barbary Coast” and the temptations of Fisherman’s Wharf (Rudolph Maté’s D.O.A.), a waterfront where “swells” and “squares”, out-of-towners and patricians alike go slumming. On the other hand, the hills and slopes dramatize the urban grid, allowing a climactic use of literally “cliffhanging” situations (Robert Wise’s The House on Telegraph Hill) and creating a whole geometry of fear and chaos. The prominence of oblique lines in the cityscape is exploited not only for its graphic expressiveness but for its dramatic potential (perspectives as lines of fire in Edward Dmytryk’s The Sniper, steep, layered streets as 3-D maze for the chase scenes in David Miller’s Sudden Fear). Thus, the city becomes a character in its own right, ripe with a plurality of fictions, whose visual treatment wavers between realism (location shooting) and a baroque, nightmarish quality
Le cinéma hollywoodien dit « classique » se définit par des critères non seulement économiques (o... more Le cinéma hollywoodien dit « classique » se définit par des critères non seulement économiques (oligopole des studios, concentration verticale, production de masse) et idéologiques (le respect du « code Hays » d''autocensure) mais aussi esthétiques, qu''on identifie généralement à un idéal de transparence (soit le refus de toute réflexivité trop voyante pouvant menacer la willing suspension of disbelief), de lisibilité et de complétude du récit. Mais si cette forme, qui doit évidemment beaucoup au modèle romanesque hérité du dix-neuvième siècle, et qui accorde la primauté au narratif, rassure le spectateur par une promesse –-affirmée dès le générique –-de familiarité, elle se doit aussi de l''intriguer, de le happer d''emblée dans la fiction. Et si elle a connu son apogée, son point extrême de raffinement et d''équilibre dans les années quarante, c''est aussi parce que ce cadre autorisait des variations apparemment hétérodoxes, un jeu ...
L'écran de la conscience : le film, modèle et matrice de la fiction chez Pynchon, Coover, DeLillo
Pynchon,Coover et DeLillo appartiennent a la premiere generation litteraire americaine pour qui l... more Pynchon,Coover et DeLillo appartiennent a la premiere generation litteraire americaine pour qui le cinema est alle de soi,au point d'informer et de nourrir leur fiction. Le film represente pour eux a la fois une mythologie coherente et vivace et un dispositif de perception du monde qui fait la part belle a l'experience du spectateur. Ils mettent donc en scene des personnages cinephiles voire comme Coover le programme exhaustif d'une seance de cinema et les processus techniques du cinema sont autant d'outils pour metamorphoser leur rapport au reel. Un reel qui notamment chez DeLillo tend a se reduire a une scene autoparodique. Le cinema induit aussi une facon nouvelle de penser et de vivre le temps,sur le mode a la fois de la repetition et de l'irreversible,ne laissant que le spectacle retrospectif d'une catastrophe. Cette face sombre du ballet d'images amene a chercher une issue : violence vouee a l'echec ou tentation du decalage chez DeLillo,celebrat...
L’adaptation cinematographique de A Streetcar Named Desire par Elia Kazan est contemporaine de la... more L’adaptation cinematographique de A Streetcar Named Desire par Elia Kazan est contemporaine de la reflexion de la critique bazinienne sur la theâtralite au cinema et sur l’usage de la profondeur de champ et du plan-sequence. A ces enjeux theoriques, le film apporte une reponse empirique : s’il respecte globalement l’unite de lieu de la piece de Williams, il en morcelle l’espace, sans cesse reinvente par la multiplication d’angles de prise de vue et de valeurs de plans, et par la primaute du montage sur le plan-sequence. Quant a la profondeur de champ, elle est employee moins comme vecteur d’ambiguite que comme procede expressif. Kazan fonde ainsi un style heterogene mettant en valeur la performance d’acteur avant toute chose, et developpant une esthetique de l’eclat qui traite chaque plan comme un paroxysme autonome.
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